À LA RENCONTRE DES COMMUNS MARSEILLAIS

L’assemblée des communs à Marseille s’est construite sur le principe de la rencontre des participant-tes avec les actrices et acteurs des initiatives citoyennes  locales, vécues ou se reconnaissant comme des communs. C’est ainsi que nous avons pu aller le premier jour à la rencontre des habitants et collectifs de Noailles, du quartier d’Air Bel avec « Il fait bon vivre dans ma Cité » et « L’Amicale des locataires », à Malpassé l’association « Santé Environnement », à Bonneveine « L’Auberge des femmes ».

Le deuxième jour, un parcours de balade-atelier appelé « les sens de la pente) a permis de découvrir les expériences de Thalassanté, du Parc Foresta en passant par l’Estaque Riaux , de Miramar et du Terrain d’aventure en étant accompagnés par des habitant.e.s impliqué.e.s au sein de la coopérative Hôtel du Nord. Ces cinq initiatives ont révélé des manières qu’ont les communs de tisser ensemble les enjeux de nos rapports à la nature, à l’espace public, de l’accès et du partage des ressources, de l’habiter, et de la production et du partage de la connaissance utile pour les résistances. L’autre balade atelier « rencontre 14 » a permis de découvrir les expériences de l’AprèsM et des 8 Pillards.

NOAILLES

La catastrophe et la mobilisation des habitants
Le 5 novembre 2018, deux immeubles de la rue d’Aubagne dans le quartrier de Noailles à Marseille se sont effondrés causant la mort de huit personnes. Dans la plus grande confusion, plus d’une trentaine d’immeubles sont évacués dans le quartier. Dans les semaines et mois qui suivront, plus de 800 immeubles feront l’objet d’un arrêté de péril provoquant le déplacement de plusieurs milliers de Marseillais évacués de leurs logements. Les évènements de la rue d’Aubagne ont exposé au grand jour l’inaction des élus de la ville de Marseille face au logement insalubre et provoqué un déplacement d’habitants d’une ampleur inédite. Les violences invisibles du mal-logement sont devenues visibles. C’est le point de départ de mobilisations d’habitants de grande ampleur qui marqueront un tournant dans l’histoire de Marseille.
Le samedi 10 novembre 2018, une marche blanche rassemble 10 000 personnes en hommage aux huit victimes. Cette manifestation était l’expression de l’indignation du peuple marseillais face au logement insalubre mais aussi le reflet du processus d’auto-organisation des habitants. En quelques jours le hashtag #balancetontaudis est devenu viral permettant de signaler plusieurs centaines de logements insalubres.
La semaine suivante, une marche de la colère est organisée en bas de la rue d’Aubagne « pour que les responsables du drame de la rue d’Aubagne et du pourrissement des habitants » soient condamnés !
Déterminés, les habitants vont multiplier les actions contre l’habitat indigne tout au long du mois de décembre 2018.
En quelques semaines, la rue d’Aubagne est ainsi devenue l’épicentre d’un vaste processus d’auto-organisation des habitant.e.s. En se réappropriant la rue comme lieu d’expression et de mobilisation, les habitants ont fait de la rue d’Aubagne un commun urbain. La petite place Homère devient un lieu de recueil et de rassemblement en hommage aux victimes. Les murs se sont recouvert d’affiches, des messages ont été peints sur les trottoirs et les façades. Des assemblées populaires ont rassemblé des centaines de personnes différentes. L’histoire tragique a donné naissance à des mouvements d’habitants animés d’une rage porteuse d’espoir et d’une volonté d’agir qui s’étend à l’échelle de la ville.

La lutte pour le relogement
Au printemps 2019, la question du relogement des délogés sera au cœur des négociations entre les collectifs et les pouvoirs publics. Alors que les évacuations et démolition se poursuivent, les collectifs réussissent à imposer leurs conditions dans une charte du relogement co-construite par l’Etat, la Ville de Marseille, le Collectif du 5 Novembre – Noailles en Colère, Un Centre ville pour Tous et de nombreux autres partenaires. La charte expose le cadre de mise en place des procédures pour les personnes évacuées (l’insalubrité, le péril, les modalités d’évacuations de logement) ; les dispositifs d’accompagnement des personnes évacuées, la prise en charge de leur hébergement et de leurs besoins élémentaires et la prise en compte du traumatisme psychologique qu’elles subissent, et l’ensemble des étapes vers le relogement définitif. La signature de la charte en Juillet 2019 après de longues négociations marquera une victoire des associations pour la défense des droits des habitant.es impactés.
La parole collective s’est progressivement structurée pour élargir les revendications du logement à la ville. La publication du « Manifeste pour une Marseille Vivante, Accueillante et Populaire » a listé une série de revendications allant de la réquisition des logements vides à la lutte contre spéculation immobilière mais aussi exigeant la rénovation des écoles, l’annulation des partenariats publics-privé (…) et la construction d’opération d’urbanisme avec les habitants.

Perspectives des luttes urbaines à Noailles
Si le soutien matériel aux habitants affectés par le logement insalubre est toujours une priorité, une nouvelle phase s’ouvre avec les projets de réhabilitation des immeubles insalubres à Noailles comme dans le reste de la ville. Dans le cadre du projet partenarial d’aménagement (PPA), plusieurs îlots ont été identifiés pour réaliser des opérations de réhabilitation exemplaire. Le projet est porté par la Métropole Marseille Provence, la Ville de Marseille et l’Etat, mais la ville de Marseille a la délégation de la concertation pour la mise en œuvre du projet. Tout ce qui concerne le logement insalubre à Noailles est un enjeu politique très important pour la nouvelle municipalité du printemps marseillais qui est attendu au tournant sur ce sujet par les habitant.es.
Un espace du musée d’histoire de la Ville de Marseille est aujourd’hui dédié à l’exposition des images, objets et archives des effondrements de la rue d’Aubagne. Une discussion s’est ouverte sur cette collaboration originale entre habitants, conservateurs, associations, artistes et chercheurs sur la mémoire des effondrements du 63 et 65 rue d’Aubagne. A l’initiative de la coopérative de l’Hotel du Nord, le projet « Prendre place » a été imaginé pour que « les habitants organisent leurs archives, écrivent leurs mémoires et transforment leur avenir à travers un processus de patrimonialisation ».

Une histoire à construire dans le temps long
L’histoire du quartier de Noailles est à envisager dans un temps long. Les mobilisations des habitants ont permis la transmission d’une mémoire collective des lieux.
La mobilisation des habitants doit donc se poursuivre pour réussir à imposer des conditions une réelle co-construction du projet urbain afin de défendre le patrimoine de Noailles comme un commun urbain.

Compte-rendu par @David Bodinier

 

Thalassanté

Thalassanté* est un tiers-lieu maritime qui s’est créé dans le secteur de l’Estaque il y a 21 ans, pour défendre un accès à la mer pour tou.te.s. Il est implanté au** Port de la Lave** qui sert à l’appareillage de petits bateaux, d’atelier de déconstruction, de parking, de lieu de pêche et de balade.
Composé de conteneurs aménagés en atelier, bar et bibliothèque, son agencement a généré des petits espaces communs, des terrasses où l’on peut admirer le golfe de Marseille et une petite place centrale où sont entreposés quelques bateaux. Ce lieu est aujourd’hui menacé d’expulsion alors qu’il favorise des usages populaires du bord de mer dans une zone exclusivement dédiée aux activités du port autonome.
Les habitants témoignent de l’ampleur des défis pour les communs à l’époque de l’anthropocène. Les communs sont situées à différentes échelles : le tiers-lieu, le port de la Lave, l’Estaque, le massif de la Nerthe (…) et la propriété foncière est divisée entre des grands acteurs privés et publics, avec des scènes de négociation dans les instances opaques du Grand port maritime de Marseille. Un scénario pro-commun serait de renforcer les usages actuels créant une dynamique collective pour élaborer un projet d’aménagement alternatif qui défendent les communs, la biodiversité, le droit à la ville et les usages populaires du littoral dans les documents de planification urbaine et territoriale (PLUI, PADD…).
Si le rapport de force est suffisant, des négociations avec la municipalité pourraient aboutir à transformer les politiques urbaines locales qui projettent à moyen terme une mutation urbaine du secteur avec l’installation d’équipements culturels et touristiques favorisant des programmes immobiliers.
Pour éviter une gentrification grimpante, le plan d’aménagement des espaces publics devra être accompagné par une régulation du logement avec un taux de logement social et des coopératives d’auto-réhabilitation. La question épineuse des pollutions de la colline de la Nerthe pourrait être envisagé sous l’angle des « communs négatifs ».

Compte-rendu par @David Bodinier

L'Estaque

Nous avons ensuite commencé notre traversée du nord de Marseille, en se faufilant dans les rues de l’Estaque, par la montée Antoine Castejon qui longe le petit ruisseau des Rioux. Des conversations se sont engagées par petits groupes. Quelqu’un a évoqué la fabuleuse « Histoire d’un ruisseau » d’Elisée Reclus : « l’Histoire d’un ruisseau, même celui qui naît et se perd dans la mousse, est l’histoire de l’infini. Ces gouttelettes qui scintillent ont traversé le granit, le calcaire et l’argile ; elles ont été neige sur la froide montagne, molécule de valeur dans la nuée, branche écume sur la crête des flots (…). Au bord du ruisseau, des petites maisons ont été construites dans la pente selon un mode de construction vernaculaire, loin des contraintes de l’alignement et de l’adressage imposées par la planification urbaine. Au delà des murs, on imagine bien ces petites courettes où les habitants ont pu avoir l’habitude de se retrouver pout tchatcher et s’entraider, qui est certainement une image d’Épinal forgée par les contes cinématographiques de Robert Guédiguian.
Nous avons rejoint le quartier de l’Estaque Gare en bus pour se retrouver dans une petite cour de l’Harmonie de l’Estaque. Une discussion s’est ouverte sur la première industrialisation qui a transformé le village de pêcheur pour implanter des tuileries et briqueteries sur le site argileux du bassin de Séon et l’exploitation du calcaire blanc de la Nerthe. Le territoire a été alors profondément transformé avec la création d’infrastructures ferroviaires et portuaires pour transporter les matériaux servant à la construction d’usines et des digues. L’Harmonie de l’Estaque témoigne des sociabilités ouvrières structurés par la paroisse de Saint-Henri qui se sont perpétuées en se transformant à travers le temps. En remontant la pente, une habitante jouait de l’accordéon dans sa rue qui se nomme la traversée de l’Harmonie. Ce petit moment était magique dans cette longue traversée des quartiers nords. Brefs échanges sur le rôle de la musique pendant la période de confinement pour renforcer les liens entre voisins. En marge du groupe, une discussion s’est ouverte sur l’histoire de la prud’hommie de l’Estaque qui pourrait faire l’objet d’une réflexion ultérieure, en lien avec les travaux passés sur le rôle des prud’homies de pêche méditerranéennes dans la défense des communs.

Compte-rendu par @David Bodinier

Castellane

Nous avons ensuite commencé notre traversée du nord de Marseille, en se faufilant dans les rues de l’Estaque, par la montée Antoine Castejon qui longe le petit ruisseau des Rioux. Des conversations se sont engagées par petits groupes. Quelqu’un a évoqué la fabuleuse « Histoire d’un ruisseau » d’Elisée Reclus : « l’Histoire d’un ruisseau, même celui qui naît et se perd dans la mousse, est l’histoire de l’infini. Ces gouttelettes qui scintillent ont traversé le granit, le calcaire et l’argile ; elles ont été neige sur la froide montagne, molécule de valeur dans la nuée, branche écume sur la crête des flots (…). Au bord du ruisseau, des petites maisons ont été construites dans la pente selon un mode de construction vernaculaire, loin des contraintes de l’alignement et de l’adressage imposées par la planification urbaine. Au delà des murs, on imagine bien ces petites courettes où les habitants ont pu avoir l’habitude de se retrouver pout tchatcher et s’entraider, qui est certainement une image d’Épinal forgée par les contes cinématographiques de Robert Guédiguian.
Nous avons rejoint le quartier de l’Estaque Gare en bus pour se retrouver dans une petite cour de l’Harmonie de l’Estaque. Une discussion s’est ouverte sur la première industrialisation qui a transformé le village de pêcheur pour implanter des tuileries et briqueteries sur le site argileux du bassin de Séon et l’exploitation du calcaire blanc de la Nerthe. Le territoire a été alors profondément transformé avec la création d’infrastructures ferroviaires et portuaires pour transporter les matériaux servant à la construction d’usines et des digues. L’Harmonie de l’Estaque témoigne des sociabilités ouvrières structurés par la paroisse de Saint-Henri qui se sont perpétuées en se transformant à travers le temps. En remontant la pente, une habitante jouait de l’accordéon dans sa rue qui se nomme la traversée de l’Harmonie. Ce petit moment était magique dans cette longue traversée des quartiers nords. Brefs échanges sur le rôle de la musique pendant la période de confinement pour renforcer les liens entre voisins. En marge du groupe, une discussion s’est ouverte sur l’histoire de la prud’hommie de l’Estaque qui pourrait faire l’objet d’une réflexion ultérieure, en lien avec les travaux passés sur le rôle des prud’homies de pêche méditerranéennes dans la défense des communs.

Compte-rendu par @David Bodinier

Miramar

Les terrains de l’ancienne Villa Miramar font partis d’un legs du sculpteur et mécène Jules Cantini à la ville de Marseille au début du Xxème siècle. Cet ancien terrain bastidaire supposé inaliénable a été cédé en 2011 à un entrepreneur industriel spécialisé dans le stockage de containers maritimes. Depuis plusieurs années, des habitants se mobilisent pour défendre ce commun et ces paysages immortalisés par les toiles de Cézanne. Les habitants du quartier l’Estaque Gare-Saint Henri ont de nombreux usages dans ce rare espace naturel entouré par les infrastructures routières, ferroviaires, maritimes et aéroportuaire. Depuis deux ans, des habitant.es se mobilisent pour défendre ce commun à partir des usages riverains s’articulant autour d’enquêtes collectives (écologiques, urbanistiques, patrimoniales…) pour interpeller les institutions publics afin modifier les zonages du Plan local d’Urbanisme (PLU) afin d’éviter l’extension de la zone industrielle et logistique.

Compte-rendu par @David Bodinier

Foresta

La balade s’est terminée dans le parc Foresta à proximité de Grand Littoral. Des vastes espaces ont été laissés vacants par une ancienne carrière d’argile qui appartenait au Marquis de Foresta. Malgré le rachat du foncier par le promoteur Xavier Giocanti (marié à Christine Lagarde !), l’instabilité géologique d’un terrain argileux en pente a freiné l’urbanisation du site. Au fil du temps, le lieu est utilisé par les riverains pour des usages familiaux et récréatifs. Depuis cinq ans, l’association Yes We Camp a signé une convention d’occupation temporaire avec le promoteur pour favoriser la création d’activités culturelles et de loisirs. Malgré les nombreuses critiques de cette alliance improbable entre des associations et un promoteur capitaliste, le parc Foresta est envisagé comme un vaste commun urbain au cœur des quartiers Nords. Cette situation n’est pas sans rappeler les droits acquis par des usagers sur des terrains privés dans l’époque pré-moderne. La période de transition qui s’ouvre aujourd’hui pour le parc Foresta déterminera l’avenir de ce lieu qui semble dépendre des capacités d’auto-organisation des habitants et associations face aux intérêts du promoteur privé. Alors que le rapport semble inégal entre le pot de terre et le pot de fer, peut-être que le terrain argileux sera finalement favorable aux communs ?

Compte-rendu par @David Bodinier

L'APRÈS M

L’histoire
Fortement incité par les politiques publiques de l’époque, Mac Do ouvre en 1992 son premier restaurant « de banlieue » dans les quartiers nord de Marseille. Plus précisément dans le quartier de Saint Barthélémy, dans le 14ème arrondissement de Marseille. 77 emplois sont créés pour les habitants du quartier mais leur précarité pousse les salariés à se syndiquer. Dans un premier temps Mac Do accorde à sa franchise des droits exceptionnels avant de décider de se débarrasser de ce restaurant en le mettant en faillite. Un projet de restaurant hallal asiatique devait le supplanter.
Les salariés et la population du quartier s’y opposent au cours d’une grève puis d’une occupation jusqu’au licenciement de la quasi totalité des salariés.
Dès lors le site est investi par un collectif d’associations qui le transforme en plateforme d’alimentation solidaire pour les quartiers populaires, baptisée « L’après M ».
Le premier confinement donne l’opportunité de nouer des liens avec des paysan-es et des commerçant-es afin d’organiser l’approvisionnement de plusieurs milliers de personnes. Ce sont ainsi quelque 1200 personnes qui viennent chaque lundi matin pour une distribution de nourriture.

Le projet de l’Après M
L’Après M constitue une symbiose entre la lutte sociale menée par les salarié-es et la mobilisation des habitants pour qui le site de ce Mac Do est devenu un lieu de rencontres et d’initiatives solidaires (création d’une Union Bienveillante d’Entraide pour les Repas -UBER- solidaires). Après les licenciements et la fermeture par Mac Donald, une association de « préfiguration pour un fast social-food » est créée pour faire vivre le projet d’un restaurant ou chacun-e pourrait venir manger en fonction de ses ressources. Mais le site est menacé de fermeture administrative et de démolition. Pour y pallier, un seul moyen, devenir propriétaire du lieu en créant une Société Citoyenne Immobilière « La part du peuple » qui est en fait une association fédérant rapidement jusqu’à deux mille souscripteurs ayant apporté chacun-e 25 €, l’objectif étant d’atteindre les 50.000 souscripteurs pour pouvoir racheter le site. Le conseil d’administration est composé d’anciens salariés du Mac Do et de souscripteurs tirés au sort et se dote des statuts qui garantissent que le projet ne pourra pas être détourné de sa finalité.
Mais en 2021 la ville de Marseille décide d’acheter le site et propose à l’association une convention précaire avec un loyer mensuel. L’association elle, préfèrerait obtenir un bail emphytéotique, ce qui pose toute une série de questions d’ordre juridique. La Ville doit-elle lancer un appel à manifestation d’intérêt (AMI) ? Peut-elle négocier de gré à gré en passant pas sa Société d’Economie Mixte ? La jurisprudence de la Cour Européenne de Justice et l’application de la « Directive Services » peuvent-elles s’appliquer ?
Le projet se réoriente donc vers la création d’un (tiers) Lieu (Local d’Initiative d’Entraide Urbaine) comprenant un restaurant solidaire avec une dizaine d’emplois permanents et une centaine de bénévoles. Un projet d’agriculture urbaine pourrait s’y greffer (poulailler déjà en service + activité de débroussaillage des espaces publics avec des chèvres).
Le statut pourrait être celui d’une SCIC qui deviendrait locataire du site détenu par la Mairie.

Une phrase de Fathi Bouara (une des personnes les plus impliquées dans l’aventure) reprise par le journal Slate représente bien en quoi l’Après M a des allures de communs :
« Si l’on veut que le projet perdure, il faut que le lieu nous appartienne. Mais si l’on veut éviter qu’il soit l’affaire de quelques-uns, il faut qu’il soit la propriété de tous.»
C’est ce qui a motivé la création d’une association : La Société Citoyenne Immobilière. Pour y adhérer il suffit de prendre une cotisation unique (payée 1 seule fois) de 25 euros : La part du peuple. L’objectif est de réunir suffisamment de « parts » (cotisation) pour pouvoir se porter acquéreur du lieu. Soit 50 000 cotisants.
Ce qui nous a conduit à partir de l’Après M pour démarrer la journée du Labo est que cette « aventure » concentre tous les items identifiés dans les groupes du labo :

  • La question foncière :
  • La relation public-communs
  • La gouvernance
  • La démarche instituante
  • La créativité juridique

 

La question foncière
Derrière un simple Mc Donalds’, ce que défendaient déjà les anciens salariés, c’est qu’il y avait un lieu qui avait été tenu et développé par des habitants du quartier, que beaucoup de jeunes des environs s’y retrouvaient voire s’y faisaient leurs premières armes dans le monde du travail. Un lieu de vie et de socialisation menacé injustement de liquidation judiciaire avec licenciement de tous les salariés, sous la dictée des équations capitalistes incompréhensibles.
En pleine bataille judiciaire, et pour répondre aux besoins alimentaires urgents du quartier et des environs, le Mc Do est occupé et devient la plus grande plateforme régionale de distribution alimentaire. Des dizaines de bénévoles viennent donner la main. C’est à une véritable appropriation collective que l’on assiste. Et les occupants n’en démordent pas, ce lieu c’est celui du quartier et de tous les habitants et bénévoles qui y viennent tous les jours ou toutes les semaines. Le lieu a partir duquel se composent et repartent des centaines de colis alimentaires. Les personnes qui s’y investissent sont déterminées à chercher les moyens de le racheter.
La Société Citoyenne Immobilière est alors créée. Sur le site de l’association on peut lire : « La Société Citoyenne Immobilière est une association à but non lucratif dont l’ensemble des adhérents participe à acquérir ou plutôt reprendre la maîtrise légale des bâtiments, des terrains et du matériel de l’ex MacDo de Ste Marthe à Marseille.
La SCI a pour ambition de rassembler au moins 50 000 personnes pour donner les moyens au projet de Fast-Social-Food géré par une SCIC composée d’anciens salariés, d’habitants, de commerçants, d’artistes et de tous ceux qui rêvent d’un monde centré sur l’humain, le partage et l’entraide ». La part du peuple est lancée (cotisation unique/payée une seule fois, à 25 euros).


Le projet est donc de récupérer le bâtiment pour, entre autres, poursuivre la distribution de colis alimentaires et créer un fast social food, restaurant d’insertion proposant des repas de qualité à tarif modulé en fonction des revenus.

La relation public-communs

En 2020 une coalition de gauche remporte la mairie. S’ensuivent alors des discussions pour chercher du soutien auprès de la nouvelle municipalité.
Pendant ce temps, les occupants sont menacés d’expulsion par la direction de Mc DO. Celle-ci refuse toute négociation avec les occupants.
Finalement la Mairie propose de racheter le bâtiment. Le rachat est acté, ce qui arrête la procédure d’expulsion.
La négociation était encore en cours ( à l’issue de l’assemblée des communs) entre la mairie et les bénévoles pour tenter de trouver une formule de mise à disposition du bâti satisfaisante pour chacune des parties.

Gouvernance et démarche instituante

La Société Civile Immobilière doit, à terme, rassembler les 50 000 adhérents qui auront « pris part » à l’achat du bâtiment.
Son Conseil d’administration est composé de :
15 membres fondateurs parmi les 35 figurant sur une liste
De 2 membres adhérent.e.s et concomitamment membres de la SCIC de l’ »Après M » nommés par le Conseil d’administration
De 13 membres actifs ou bienfaiteurs de l’association tirés au sort lors de la 1ère assemblée générale ordinaire suivant l’assemblée générale constitutive

En juillet 2021, une seconde association : « A cœur Vaillant » a été créé en juillet 2021 « pour le développement du projet solidarités et la gestion au quotidien des activités d’entraide.
La prochaine étape, à court terme, est la création d’une coopérative de restauration économique et sociale, qui portera l’activité de restauration, sous forme de Société Coopérative Immobilière.

 

Les 8 Pillards

Friche culturelle, les 8 Pillards est une occupation d’espace en communs.
Elle rassemble des compagnies, collectifs d’architectes, artistes-marcheurs et artisans autour de l’occupation d’une friche industrielle dans le quartier Bon Secours à Marseille. Installée dans l’ancienne usine,la communauté de travail s’est constituée autour des arts visuels, plastiques, scéniques, de l’architecture, du design et de l’urbanisme.

Elle se nomme “Laboratoire de production et de vie” et expérimente des pratiques urbaines en réponse aux défis environnementaux et en témoignant de manière plurielle de ce que signifie aujourd’hui être artiste, artisan ou architecte.

Le caractère temporaire de cette occupation a amené cette communauté à s’interroger sur les stratégies foncières qui lui permettrait de préserver l’en-commun constitué à l’usage à travers l’occupation du lieu.